Sous le charme des Hautes-Côtes : les appellations communales à ne pas manquer

20/06/2025

Les Hautes-Côtes : une spécificité bourguignonne

Avant de plonger dans le détail des appellations, il est essentiel de revenir sur ce qui différencie les Hautes-Côtes : exposées davantage aux vents, les vignes flirtent ici avec les 350 à 450 mètres d’altitude, là où la Côte classique s’arrête vers 300 mètres. Ce dénivelé induit une géographie particulière : des coteaux à la pente douce, des sols souvent pierreux ou marneux, et, surtout, un climat plus frais, qui séduit aujourd’hui nombre de vignerons face au réchauffement climatique.

  • Altitude moyenne : 350-400 mètres
  • Superficie totale (2022) : environ 1 500 hectares plantés (source : BIVB)
  • Production : majorité de vins rouges (Pinot Noir), mais aussi notables blancs (Chardonnay)

Ces conditions, que d’aucuns auraient jugées « limites » autrefois, offrent en réalité une signature : les vins y cultivent fraîcheur, fruité éclatant et vivacité. La montée en qualité s’accompagne aujourd’hui d’une réflexion sur les sols et les microclimats, qui fait naître des cuvées de plus en plus identitaires…

Appellation communale, qu’est-ce que cela signifie dans les Hautes-Côtes ?

À la différence de la Côte elle-même, très découpée en villages et climats (Gevrey, Chambolle, Meursault, etc.), les Hautes-Côtes possèdent historiquement deux grandes AOC régionales :

  • Bourgogne Hautes Côtes de Nuits
  • Bourgogne Hautes Côtes de Beaune

Pour les Hautes-Côtes, le concept d’« appellation communale » est encore jeune : quelques villages commencent à obtenir la valorisation de leur nom à travers les mentions « Coteaux Bourguignons », « Bourgogne Côte d’Or » ou « cuvées parcellaires » qui valorisent leur identité. Toutefois, la reconnaissance « officielle » du village, à l’image de Pommard, n’est pas (encore) acquise… Se distinguent néanmoins dans la pratique certaines communes : Villers-la-Faye, Magny-lès-Villers, Chevannes, Marey-lès-Fussey, Echevronne—où l’identité des vins s’affirme.

Pourquoi cette évolution vers des vins de village ?

Cela s’explique par trois facteurs :

  1. Climats bien identifiés (lieux-dits historiques)
  2. Ampélographie spécifique (vieux pinots fins, vieux chardonnays)
  3. Générations de vignerons engagés (domaine familial, néo-vignerons, projets collectifs BIO ou biodynamiques…)

Tour d’horizon : villages et terroirs émergents des Hautes-Côtes

Villers-la-Faye : la montagnarde élégance

Situé à la croisée des Hautes-Côtes de Nuits et de Beaune, Villers-la-Faye se distingue par ses coteaux ventés, exposés à l’est et sud-est. Ici, le pinot noir prend une profondeur inattendue : un nez délicat de griotte, des touches épicées, et une bouche ciselée, à la fois droite et gourmande. Plusieurs domaines y mènent un travail pointu, à l’exemple du Domaine Charles Audoin (cité par Terre de Vins) connu pour l’éclat de ses cuvées.

  • Superficie plantée : environ 75 hectares (source INAO)
  • Altitude : entre 350 et 410 mètres

Les blancs, quoique plus rares, expriment ici des notes de fleurs blanches, d’agrumes mûrs, avec une minéralité saline très séduisante.

Chevannes : la force du calcaire

Plus au nord, Chevannes capte l’attention des initiés par un terroir où le calcaire affleure au sol. Les argiles fines associées donnent des rouges puissants, au toucher velouté, qui résistent très bien au vieillissement. Les années solaires leur permettent d’exprimer un registre fruité généreux (cassis, cerise noire) tout en conservant cette vivacité typique de l’altitude. À souligner, le domaine familial Aline Beauné, certifié BIO depuis 2019, dont les vins démontrent l’incroyable potentiel des pinots locaux (Vitisphere).

  • Cépage dominant : Pinot Noir, quelques rangs historiques de Gamay
  • Sol : calcaire bajocien et argile brune

Magny-lès-Villers : le creuset des nouvelles générations

Cette commune dynamique au sein de la Côte d’Or attire de jeunes vignerons, c’est le laboratoire des « nouveaux vignerons ». Aux côtés de vieilles familles (domaine Cornu-Camus, domaine Meunier), s’implantent depuis les années 2010 toute une génération d’artisans du vin, certains venus de la Côte, d’autres installés ici par passion du terroir. Le parcellaire est morcelé, offrant des vins à la fois singuliers et révélateurs du lieu : en rouge, un fruit rouge acidulé, une bouche aérienne ; en blanc, des arômes de poires sauvages et de citron vert, parfois de légères notes fumées issues des sols pierreux.

  • Particularité : forte part de plantations à hautes densités (ex. : 11 000 pieds/ha)
  • Climat : influence marquée du vent, belle fraîcheur finale

Marey-lès-Fussey & Echevronne : secrets bien gardés des Hautes-Côtes

La vallée qui relie ces deux villages, souvent enveloppée de brume matinale, est bordée de vignes historiques dont certaines furent taillées pour fournir de grands domaines de la Côte. Le relief accidenté, les expositions variées et une dominance de sols bruns calcaires donnent ici des vins de caractère, longs en bouche, qui se dévoilent après quelques années de garde. Quelques micro-cuvées, en rouge comme en blanc, sont régulièrement saluées par la presse régionale (La Revue du Vin de France).

  • Style des vins : structure affirmée, souvent épices douces et minéralité marquée
  • Sélection régionale : Blancs gourmands, rouges profonds avec une texture de bouche enveloppante

L’altitude, un atout pour les vins communaux d’aujourd’hui

Face au réchauffement du climat, les parcelles à 400 mètres d’altitude présentent des avantages certains : maturité douce, acidité préservée, équilibre naturel entre fraîcheur et puissance. Les chiffres sont parlants : la température moyenne dans les Hautes-Côtes reste en moyenne 1 à 1,2°C inférieure à la Côte (source : BIVB).

  • Pour les blancs : tension, précision aromatique, garde prolongée.
  • Pour les rouges : finesse de tanins, palette aromatique brillante, accessibilité dans leur jeunesse.

C’est d’ailleurs dans ces microclimats que de nombreux domaines expérimentent aujourd’hui des pratiques culturales alternatives et des presses lentes à l’ancienne, pour magnifier le jus.

Communalisation : une dynamique à suivre de près

L’évolution récente des classements (création de l’appellation « Bourgogne Côte d’Or » en 2017, mentions « Villages » tolérées sur certaines étiquettes, multiplication des cuvées parcellaires chez les meilleurs vignerons) témoigne d’un retour à la valorisation des terroirs. Même si la reconnaissance des villages en AOC communale prend du temps, l’émergence d’une identité locale est indéniable :

  • Montée en gamme des domaines par le soin dans la culture (« lutte raisonnée », agriculture bio…)
  • Investissement de la jeune génération de vignerons
  • Arrivée de nouveaux styles de vinification (macérations douces, élevage en fûts usagés, cuves béton…)

Cette dynamique laisse présager qu’à l’avenir, plusieurs villages des Hautes-Côtes pourraient se voir accorder une reconnaissance officielle similaire aux célèbres villages de la Côte… Un défi de patience, de passion, et surtout, d’exigence.

Sélection de cuvées à explorer pour découvrir la palette communale des Hautes-Côtes

  • Domaine Cornu-Camus, Magny-lès-Villers : Pinot Noir « Les Vignes du Père » — allie fraîcheur, fruité et élégance, belle introduction au style du village.
  • Domaine Audoin, Villers-la-Faye : Bourgogne Hautes-Côtes de Nuits « La Dame Blanche » — un blanc d’altitude à la tension remarquable.
  • Domaine Aline Beauné, Chevannes : Hautes-Côtes de Nuits Rouge Parcellaire — pureté du pinot noir, élevage discret, longueur salivante.
  • Domaine Lebreuil, Echevronne : Bourgogne Hautes-Côtes de Beaune « Sous la Roche » — l’expression d’un terroir caillouteux et vibrant.

À noter que ces cuvées sont généralement proposées à des prix très accessibles, souvent situés entre 15 et 30 € départ domaine, bien loin des grandes appellations plus médiatisées.

Vers une nouvelle reconnaissance des Hautes-Côtes : à l’écoute des terroirs d’altitude

Le précieux travail des vignerons, l’attention portée aux sols et la volonté d’affirmer la micro-identité de chaque lieu nourrissent aujourd’hui un renouveau passionnant dans les Hautes-Côtes. Les amateurs comme les curieux y trouveront une source inépuisable de découvertes, à l’opposé de l’uniformité. L’avenir s’écrit dans ces villages, dont les vins livrent une sincérité et une élégance unique à la Bourgogne. Ouvrir une bouteille des Hautes-Côtes, c’est déjà voyager au cœur d'une identité en pleine affirmation.

En savoir plus à ce sujet :

Votre guide des vins de Bourgogne, de la vigne au verre